Libertinage et couple amoureux : pratiques, repères, pactes
Explorer sans effacer l’amour
Certaines personnes aiment partager leur sexualité à deux.
D’autres aiment la partager… avec d’autres.
Et parfois, les deux se rejoignent.
Le libertinage désigne l’ensemble des pratiques sexuelles consenties impliquant plusieurs partenaires, dans un cadre clair, explicite, et souvent codifié.
C’est une autre manière de conjuguer désir, couple et expérience partagée, à travers des jeux, des scénarios, des échanges ou de simples présences croisées.
Dans ce cadre, le lien amoureux est intégré activement dans l’exploration.
Certain·es y trouvent du jeu, du renouveau, une sensation de lien renforcé par l’audace commune.
Une pratique codifiée, mais évolutive
Le libertinage contemporain prend des formes très diverses.
Parmi les plus courantes :
- l’échangisme : deux couples (ou plus) partagent un espace sexuel, avec ou sans interaction croisée
- le côte-à-côtisme : chaque couple reste en interaction avec lui-même, mais partage le lieu ou l’ambiance avec d’autres
- le candaulisme : excitation provoquée par le fait de voir son/sa partenaire avec un·e autre
- le club libertin : lieu socialisé, souvent codifié, où certaines pratiques peuvent avoir lieu
Certain·es explorent ces pratiques ponctuellement, d’autres en font une part intégrante de leur vie de couple.
Ce que ces expériences ont en commun :
➡️ un cadre consensuel
➡️ des règles explicites, fixées à deux
➡️ une communication continue, avant, pendant, après
Ce que le libertinage mobilise dans la relation
Dans un couple amoureux, ouvrir un espace libertin demande plus que de la curiosité.
Cela mobilise des compétences précises :
- affirmer ses limites sans crainte de blesser
- accueillir l’autre dans ses désirs, sans perdre son propre axe
- négocier les termes du jeu, sans confondre fantasme et réalité
- préparer le retour au lien, après l’expérience
Ces capacités s’apprennent, se rodent, se revisitent.
Selon les travaux de Jenks (1998) et de Bergstrand & Williams (2000), les couples qui pratiquent régulièrement le libertinage rapportent souvent une meilleure qualité de communication, mais aussi une augmentation des tensions si les pactes implicites ne sont pas clarifiés.
Témoignage
“Le premier soir dans un club, j’étais pétrifié.
Pas par jalousie, mais parce que tout me semblait trop rapide.
On s’était mis d’accord, on s’aimait, mais une fois sur place, c’est comme si tout basculait.
Alors on est sortis, on a pris un café à 2h du matin. Et on a tout repris, à notre manière.
Maintenant, on sait qu’on est là pour jouer, pas pour plaire.
Pour nous amuser, pas pour se prouver quoi que ce soit.”
— Romain, 42 ans, en couple et libertin “sur mesure”
Des règles claires, pas rigides
Il n’existe pas de “bonne manière” de faire.
Mais il existe des points de vigilance partagés par celles et ceux qui vivent bien ces pratiques :
- définir à deux ce qui est possible, ce qui ne l’est pas
- accepter que les désirs puissent évoluer
- distinguer ce qui relève du jeu partagé ou de la recherche extérieure de sensations
- se donner des rituels d’ancrage : se retrouver, se reconnecter, se rassurer si besoin
Certain·es posent des règles strictes (toujours ensemble, jamais avec le même partenaire, etc.), d’autres choisissent plus de souplesse.
L’important : que ces règles soient connues, comprises, respectées.
Et la jalousie ?
La jalousie peut surgir, même quand tout est consenti.
Plutôt que de chercher à l’éviter, beaucoup de couples libertins choisissent de l’accueillir comme un signal.
Elle dit parfois un besoin de sécurité, de visibilité, d’ancrage.
Elle n’annule pas le désir partagé — elle l’invite à se vivre avec plus de soin.
Certaines recherches (notamment Klesse, 2007) montrent que les couples qui parviennent à nommer ces ressentis sans les juger vivent des expériences plus stables et plus épanouissantes.
À retenir
Le libertinage est un territoire de jeu conscient, qui suppose confiance, écoute, courage et clarté.
Certain·es y découvrent un moyen puissant de se reconnecter à leur désir, à leur couple, à eux-mêmes.
Comme toute pratique relationnelle, elle gagne à être préparée, adaptée, et revue régulièrement.
Pas pour coller à une norme, mais pour rester fidèle à ce qui fait sens, à deux — ou à plusieurs.
Pour aller plus loin
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📚 Références
- Jenks, R. J. (1998). Swinging: A review of the literature. Archives of Sexual Behavior.
- Bergstrand, C., & Williams, A. (2000). Today’s alternative marriage styles: The case of swingers. Electronic Journal of Human Sexuality.
- Klesse, C. (2007). The Spectre of Polyamory: Conjugal, Sexual and Relational Citizenship in the Age of Same-Sex Marriage. Sexualities.
- Kolmes, K., Stock, W., & Moser, C. (2006). Clinician’s Experiences with BDSM and Polyamorous Clients. Journal of Homosexuality.