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Poly, ENM, échangiste… plus de catégories pour sortir des catégories?

Depuis quelques années, les catégories relationnelles alternatives se multiplient : polyamour, ENM, anarchie relationnelle, solo poly, kitchen table, relation ouverte… L’idée est claire : ouvrir l’imaginaire, sortir des normes dominantes, donner des mots à des expériences jusque-là invisibilisées voire stigmatisées. Mais au fond, est-ce qu’on ne finit pas parfois par substituer une norme à une autre ? Ne sommes-nous pas en train de créer de nouveaux cadres, avec leurs propres normes emprisonnantes, sous couvert de libération ? Est-ce que vouloir sortir des cases veut vraiment dire en créer de nouvelles ?

Les catégories : dire, comprendre, exister 

Les catégories offrent des mots pour se comprendre. Sans les mots pour le penser et pour le dire, il est impossible de donner vie à une réalité existante. Les nouvelles dénominations des manières d’aimer, de se lier, de penser la fidélité ou l’engagement, rassemblent, créent du lien. Un espace de respiration longtemps attendu.

De nouveaux groupes émergent dans lesquels on peut enfin trouver nos pairs, nos semblables, nos alliés. On ne se sent plus « déviant  » par rapport à une seule norme dominante, mais membre d’une communauté qui revendique ses différences et, par là même, nous offre la légitimité dont nous avions bien besoin.

Mais toute catégorie fige

Elle pose des contours. Elle produit des effets de seuil, de dedans/dehors. Et parfois, insidieusement, on glisse d’un outil de reconnaissance vers une norme prescriptive, avec ses injonctions, ses règles à suivre. Certain·e·s, sous prétexte de ne pas coller parfaitement aux prescriptions du groupe, s’en retrouvent exclus. L’humain, au lieu d’habiter la catégorie, se retrouve quelques fois à essayer de lui correspondre, tordant ses intuitions et ses ressentis pour coller le mieux possible à ce qui est attendu de son groupe d’appartenance.

Retour à la case départ ?

Le besoin de reconnaissance 

On a besoin, en tant qu’être humain, de reconnaissance : l’identité se construit dans le regard des autres, dans la manière dont nos expériences sont validées ou niées, par les proches, les groupes, la société. Les catégories permettent une forme de reconnaissance sociale : je peux dire ce que je vis, et d’autres savent de quoi je parle. C’est donc un levier puissant pour lutter contre l’invisibilisation ou la honte.

Avec ses travers aussi : la multiplication des modèles à l’infini, la rigidité parfois de leurs contours. Nous sommes pourtant d’une nature complexe, mouvante, nuancée qu’il est difficile de saisir ou de réduire. Les modèles ne sont, finalement, que des tentatives de capter l’humain et son relationnel, et, par définition, ces modèles ne peuvent qu’être imparfaits et réducteurs. Quand ce besoin de reconnaissance passe par la validation d’une identité figée, on risque de perdre la part fluide, vivante, évolutive du lien. D’oublier que la relation est un processus, pas une case à cocher, et que le vivant ne se découpe pas si facilement en petits tronçons.

Créer des repères sans recréer des carcans

La question n’est donc pas de rejeter les catégories, le vocabulaire, les groupes et les appellations. Les catégories permettent l’existence sociale des expériences atypiques. Mais elles ne doivent pas devenir des identités à habiter à tout prix. Alors, comment garder leur puissance d’ouverture sans tomber dans de nouveaux dogmes ? Comment utiliser ces termes comme des passerelles plutôt que comme des enclos ? Qu’elles restent un point de départ, un outil pour dire, au service de la singularité, et non un modèle à suivre à la lettre.

Et si…

Et si on se permettait d’être flous, mouvants, contradictoires ? D’aimer sans tout nommer ? Ou de nommer temporairement, sans que cela devienne une étiquette ? Si on se permettait notre petite popote personnelle, avec des ingrédients choisis, sans essayer de nous enfermer dans des nouveaux codes ? Peut-être que la vraie liberté relationnelle ne passe pas par plus de cases, mais par la possibilité de ne pas y entrer du tout.

Envie d’aller plus loin?

Vous pouvez …

Ou bien …

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