Lucidité relationnelle : voir clair, sans fuir, sans blesser
Aimer, ce n’est pas idéaliser. C’est voir. Voir ce qui est vivant, ce qui est bancal, ce qui se répète, ce qui se tait. La lucidité relationnelle n’est pas un constat froid — c’est une forme de tendresse active.
La tentation du flou
Dans bien des relations, un flou affectif persiste. Par pudeur, par peur, par confort, on évite certains sujets. On évite de nommer ce qui fait mal, ce qui manque, ce qui nous échappe. Et parfois, on appelle ça “respect”, ou “tolérance”. Pourtant, à force d’épargner l’autre — et de s’épargner soi-même — on finit par ne plus savoir où on en est. Ce n’est pas l’amour qui meurt. C’est la capacité à le regarder en face.
C’est là que commence la lucidité relationnelle.
Voir, c’est aimer autrement
La lucidité relationnelle ne consiste pas à tout analyser ni à tout contrôler. Elle consiste à développer une qualité de présence intérieure qui permet de voir le lien dans sa réalité actuelle, et non dans sa projection idéale.
Cela suppose :
- de repérer les schémas qui se répètent ;
- d’oser poser un diagnostic sans tomber dans le blâme ;
- d’assumer ses zones d’ombre comme ses élans.
La lucidité ne tue pas le lien. Elle le nettoie. Elle crée de l’espace pour une parole qui ne cherche ni à accuser ni à sauver, mais à dire : “Voilà ce que je vois. Et toi, que vois-tu ?”
Lucidité ≠ brutalité
Une confusion fréquente oppose lucidité et violence. On croit que dire les choses, c’est faire mal. Qu’exprimer un doute, c’est trahir. Qu’oser un regard critique, c’est manquer de loyauté. Pourtant, c’est souvent l’évitement qui fait le plus de dégâts.
La lucidité relationnelle est un geste d’honnêteté profonde, qui s’exerce avec douceur mais sans édulcorant. Elle n’exige pas une vérité absolue, mais une disponibilité à ajuster sa vision dès que l’autre parle.
C’est un art du regard croisé, pas du verdict unilatéral.
Pourquoi c’est un concept central dans la Créativité Relationnelle
Dans la Créativité Relationnelle, la lucidité est le point de départ de tout ajustement. Sans elle, on navigue à l’aveugle. On invente des règles sur des projections. On fait des promesses qui ne tiennent pas la météo émotionnelle.
La lucidité relationnelle :
- préserve la possibilité de coajuster avant que la relation ne dérive ;
- soutient l’évolution du pacte vivant ;
- protège contre l’auto-trahison silencieuse.
Elle ne garantit rien. Mais elle permet de choisir en conscience, et de se tenir droit·e dans ce choix.
Conclusion
Être lucide n’empêche pas d’aimer. C’est peut-être même l’inverse. C’est dire à l’autre : “Je ne veux pas t’aimer dans le flou. Je veux te rencontrer là où tu es. Et je veux oser me montrer là où j’en suis, moi aussi.” La lucidité est une forme de présence, pas un jugement. Elle est l’outil discret mais fondamental d’un lien qui se veut libre, ajusté, vivant.
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