Lien comme création : une œuvre à deux, jamais figée
On dit souvent qu’un couple, “ça se construit”. Mais si le lien n’était pas une maison à bâtir, ni un édifice à entretenir, mais une œuvre à créer, chaque jour, sans plan préétabli ? C’est cette bascule que propose la Créativité Relationnelle.
Le lien comme structure : un héritage tenace
Nous avons appris à penser les relations comme des constructions : solides, stables, logiques. Avec des fondations, des murs, un toit. Un lien “réussi” serait un lien bien bâti, bien tenu, qui résiste aux intempéries. Cette métaphore de l’architecture rassure : elle donne l’impression qu’un lien peut être sécurisé par la volonté et la rigueur. Mais elle échoue à rendre compte de la réalité mouvante, imprévisible, parfois chaotique de nos dynamiques affectives.
Dans ce cadre, toute instabilité devient une menace. Toute transformation, un risque. Et pourtant… c’est précisément dans ces moments de mouvement que la relation révèle sa vitalité.
Et si le lien était une création, pas une structure ?
Créer, ce n’est pas seulement “faire”. C’est faire advenir une forme qui n’existait pas avant. C’est prendre acte que ce qui nous relie ne relève pas d’un modèle à appliquer, mais d’un tissu à inventer.
Penser le lien comme création, c’est quitter le registre de la conformité pour entrer dans celui de l’expérimentation. Ce n’est plus : « Comment être un bon couple ? » mais : « Qu’est-ce qu’on peut faire, ensemble, qui ait du sens, maintenant ? »
C’est se permettre d’écrire une partition qui ne ressemble à aucune autre. D’y inclure des silences, des dissonances, des modulations imprévues. Et de considérer que cela aussi, c’est réussir son lien.
Une posture d’artiste relationnel·le
La Créativité Relationnelle invite à assumer une posture active, curieuse, non normative : celle de l’artiste relationnel·le.
Ce n’est pas une métaphore décorative. C’est un choix politique : refuser les scripts dominants (amour = fusion, sécurité = permanence, fidélité = transparence totale) pour entrer dans une co-construction ouverte, mouvante, consciente. Cela implique :
- d’accepter qu’il n’y a pas de mode d’emploi universel ;
- d’apprendre à observer, à sentir, à nommer ce qui se crée au fil du lien ;
- de se donner la possibilité d’ajuster la forme, sans paniquer.
Créer un lien, c’est oser sortir de la norme sans tomber dans le chaos. C’est travailler avec la matière du réel – les besoins, les blessures, les élans – pour en faire quelque chose qui a sa propre cohérence.
Pourquoi c’est un concept clé dans la Créativité Relationnelle
Ce basculement du lien-structure au lien-création est au cœur de l’approche CR. Il permet :
- de se libérer des carcans (format du couple, durée, exclusivité) sans renier la profondeur du lien ;
- de faire place à l’inattendu sans céder à l’instabilité ;
- de reconnaître que chaque relation est une œuvre, non une reproduction.
Le lien comme création redonne à chacun·e une responsabilité active. Ce n’est pas l’amour qui fait le lien, mais ce qu’on en fait. Jour après jour. Geste après geste.
Conclusion
Créer un lien, ce n’est pas “faire mieux que les autres”. C’est accepter que ce qui se vit entre deux êtres mérite d’être unique, vivant, un peu bancal peut-être, mais authentiquement façonné. Ce n’est pas un statut à atteindre. C’est une œuvre à habiter.
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